Sélection d’une population locale de Phytophthora infestans par des variétés de pomme de terre présentant différents niveaux de résistance

 

J. Montarry, R. Corbière, S. Lesueur, I. Glais, D. Andrivon

 

UMR Bio3P, INRA Rennes, Domaine de la Motte, BP 35327, 35653 Le Rheu Cedex

 

 

Comprendre la sélection exercée par la plante hôte et ses conséquences sur la structure des populations pathogènes est essentiel à la gestion des maladies des plantes, que ce soit par la création variétale ou par l'identification des meilleures stratégies de déploiement de ces variétés dans le temps et l'espace.

La réponse à la sélection exercée par les gènes majeurs, impliqués dans les résistances race spécifiques, a été démontrée pour de nombreux pathosystèmes dans le passé, y compris le mildiou de la pomme de terre. En revanche, peu d'éléments sont disponibles concernant la sélection exercée par une résistance quantitative, partielle, supposée race non-spécifique.

Nous cherchons ici à savoir si les patrons adaptatifs des populations de Phytophthora infestans sont similaires pour ces deux types de résistance, et s’ ils sont reliés au polymorphisme génotypique déterminé avec des marqueurs moléculaires.

Pour ce faire, des isolats français de Phytophthora infestans ont été échantillonnés deux années consécutives (2001 et 2002) sur des variétés de pomme de terre présentant différents niveaux de résistance (Bintje – variété sensible, Désirée – variété partiellement résistante et Naturella – variété à résistance spécifique  conférée par le gène R2), et caractérisés biologiquement pour le type sexuel et le pouvoir pathogène (virulence et agressivité) et génétiquement en utilisant des marqueurs moléculaires (AFLP).

Les populations locales étudiées sont clairement structurées par l'hôte pour la virulence : seuls les isolats originaires de Naturella sont capables d'attaquer cette variété. Mais ces populations sont également structurées par l'hôte pour l'agressivité : les isolats originaires du cultivar sensible (Bintje) sont les plus agressifs tant sur Bintje que sur Désirée, sans adaptation différentielle entre ces deux génotypes. La diversité génotypique observée est faible, ce qui suggère que la collection est constituée de quelques lignées clonales proches, et que la reproduction sexuée ne joue pas de rôle dans ces populations (malgré la présence conjointe des deux types sexuels A1 et A2 sur la parcelle en 2002). Aucune corrélation n'a été détectée entre le pouvoir pathogène et le groupe AFLP des différents isolats.

Ces données indiquent que l'adaptation pour le pouvoir pathogène a lieu dans les populations de Phytophthora infestans, mais que les patrons adaptatifs dépendent du type de résistance considéré. Il est donc indispensable d'établir des stratégies de déploiement des variétés adaptées à ces patrons adaptatifs.

 

Références :

Montarry J., Corbière R., Lesueur S., Glais I., Andrivon D. 2005. Does selection by resistant hosts trigger local adaptation in plant-pathogen systems? Journal of Evolutionary Biology,In Press.