Clonalité et sélection par l'hôte chez Puccinia triticina

 

H. Goyeau (1), F. Halkett (2), M.-F. Zapater (2), J. Carlier (2), C. Lannou (1)

 

(1) UMR Epidémiologie Végétale et Ecologie des Populations, INRA INA-PG, 78850 Thiverval-Grignon

(2) CIRAD - UMR BGPI, TA 41 / K, Campus International de Baillarguet, 34398 Montpellier Cedex 5

 

 

Des études antérieures ont permis de montrer que les populations de rouille brune du blé (Puccinia triticina, basidiomycète dicaryotique) se reproduisent de façon clonale et se structurent en fonction de la plante hôte. Sous l’angle de la génétique des populations, la structure clonale se traduit par des profils multilocus répétés et de forts déséquilibres de liaison (identifiés à l’aide de marqueurs RAPD et AFLP) Néanmoins ces études n’ont pas permis de certifier l’absence d’évènements de recombinaison ni de quantifier le niveau de pression de sélection exercé par l’hôte.

Le double objectif de notre étude était i) de préciser la structure clonale des populations, en particulier en quantifiant le niveau d’hétérozygotie à l’aide de marqueurs neutres codominants (microsatellites) et ii) de quantifier le niveau de différenciation génétique et phénotypique de populations prélevées sur des variétés différentes. Un échantillonnage systématique a été réalisé sur des parcelles de 1 Ha de deux variétés différentiées pour leurs gènes de résistance à la rouille brune : Soissons (gène de résistance Lr14a) et Trémie (gènes de résistance Lr10, Lr13).

Outre la présence de génotypes multilocus répétés et de déséquilibre de liaison entre locus, la caractérisation des isolats à l'aide de 10 marqueurs microsatellites a révélé un taux d'hétérozygotie très important, synthétisé par des valeurs de FIS fortement négatives. Ces trois éléments témoignent d’un régime de reproduction principalement clonal. En outre, l'étude de la variance du FIS entre locus nous permet de discuter l'occurrence de recombinaison au sein des populations étudiées. Chaque pathotype ou famille de pathotypes (différant entre eux par 1 ou 2 virulences seulement) correspond à un génotype unique. La diversité génotypique demeure toutefois non négligeable, puisque 14 pathotypes, correspondant à 9 génotypes différents, ont été trouvés dans la parcelle de Soissons (sur 180 individus échantillonnés). La corrélation (test de Mantel) entre distance génétique (allèles partagés) et phénotypique (présence/absence des virulences) est très significative (p<0.001). Notre étude confirme également un fort niveau de différenciation génétique entre parcelles. Etant donné les capacités de migration du pathogène, cette étude atteste que la sélection par l’hôte est bien le moteur de la différenciation génétique et phénotypique.