Gestion régionale du risque épidémique : simulation de scénarios

 

C. Lannou (1), F. Besnier, P. Auger (2)

 

(1) UMR d'épidémiologie végétale, INRA Grignon, 78850 Thiverval Grignon

(2) UMR CNRS 5558, 69622 Villeurbanne

 

 

Peu de choses sont connues sur la dynamique interparcellaire des épidémies, ainsi que sur le fonctionnement épidémique d'une région de production. Des observations empiriques et des études de populations montrent que pour des parasites foliaires comme la septoriose ou les rouilles des céréales, qui se dispersent facilement, la dynamique épidémique et le risque global associé sont influencés par la distribution des variétés hôtes à l'échelle de la région. Pourtant, la plupart des connaissances en épidémiologie sur ces parasites se situent à l'échelle intra-parcelle. Nous développons à Grignon une modélisation du risque sanitaire sur grandes cultures, à l'échelle régionale, en nous focalisant sur les parasites à dispersion aérienne. En tenant compte des caractéristiques épidémiologiques de ces parasites et de la structure du peuplement cultivé (distribution géographique des variétés, type de résistance variétale, traitements fongicides), nous cherchons à explorer différents scénarios d'évolution de la protection des cultures et du risque épidémique associé. Le modèle utilisé est un modèle matriciel en temps discret, simulant des générations successives du parasite, et basé sur un nombre limité de paramètres (production de spores, efficacité des infections, taux d'échanges de spores entre plantes et parcelles, proportion des variétés). Les scénarios testés ici consistent a remplacer progressivement, dans un paysage de 100 parcelles, des cultures traitées soit par des cultures en mélange variétal soit par des variétés à résistance partielle. Ces changements ont pour conséquence une augmentation de la sensibilité globale du paysage. Cependant, le niveau d’infection des parcelles reste relativement faible, même lorsque les mélanges variétaux ou les variétés à résistance partielle représentent la totalité des parcelles. En particulier, le niveau global d'infection reste très faible par rapport à l’infection d’un paysage sensible qui serait non traité, ce qui indique un effet de réduction du risque épidémique global (les épidémies sont plus lentes dans les parcelles à résistance partielle mais chaque parcelle reçoit également moins de spores de ses voisines). Le nombre de parcelles de type sensible ou résistant n’est cependant pas suffisant pour expliquer complètement la quantité d’infections sur le paysage agricole. Le niveau d’infection dépend également de la répartition spatiale des parcelles sur le paysage, en particulier de la répartition relative des parcelles sensibles et résistantes. Afin de pouvoir caractériser la structure spatiale du paysage agricole, en relation avec le niveau de sensibilité des parcelles, un indice représentatif de la fragmentation du paysage a été établi, basé sur le nombre de frontières communes entre deux types de parcelles différentes (occupées par des variétés différentes) et le niveau de sensibilité de chaque variété présente. Cet indice fournit une assez bonne prédiction de la sensibilité globale à l’échelle du paysage agricole. Les simulations montrent également que le niveau de fragmentation influe nettement sur la sensibilité globale du paysage, et donc sur le risque individuel pour chaque parcelle.